“Pourquoi les Gaspésiens voulaient-ils vendre leur chemin de fer au gouvernement fédéral? Question qui avait une réponse tant humaine qu’économique. Ces deux aspects justifieront les démarches officielles de la part des députés et du clergé. Cependant, la situation humaine des Gaspésiens fut très présente durant toutes ces démarches. Cet aspect était important selon Émile Miller : « Les âmes sont pleines d’une inquiète mélancolie, prisonnières qu’elles sont sur un étroit littoral, entre la mer formidable, râlant ses éternels ressacs, et les prochains escarpements calcaires de l’intérieur que les brumes, les pluies cinglantes du large ont revêtus de bois sombres. “1

Roland Philippe Babin

Les Gaspésiens avaient besoin de vendre leur chemin de fer pour quitter leur misère, pour parvenir à vivre honorablement. Ce chemin de fer de la baie des Chaleurs devenu national pourrait, alors, leur ouvrir un marché pour leur poisson : « Pourquoi est-ce que Montréal n’achète que du poisson du Nouveau-Brunswick? Le gouvernement pourrait s’arranger avec le Canadian National pour faire transporter le nôtre? »2

Cette revendication se trouva dans tous les cœurs gaspésiens du début du 20e siècle. Elle y fut au centre de toutes les démarches des porte-parole du peuple de la Gaspésie. Les délégués ont fait tout en leur pouvoir pour que, grâce au chemin de fer gaspésien incorporé à celui de l’Intercontinental, les colons aient aisément et régulièrement accès aux marchés du Québec et des provinces des Maritimes. C’était le plus grand résultat à obtenir pour aider les Gaspésiens si l’on en croit Arthur Buies : « Toutes les parties habitées de la Matapédia se trouvent en communication directe et rapide avec la grande voie ferrée et l’Intercontinental, elles peuvent écouler journellement leurs produits sur tous les marchés du Dominion. »3

Évidemment, c’était le cas de la Matapédia qui avait son chemin de fer relié à l’Intercontinental. C’est pourquoi des démarches furent entreprises pour que le gouvernement fédéral devienne propriétaire du chemin de fer de toute la péninsule gaspésienne, péninsule défavorisée par un système ferroviaire défectueux par son administration et par son entretien. Le gouvernement d’Edmund-James Flynn, les députés Charles Marcil et Rodolphe Lemieux, Mgr François-Xavier Ross, évêque de Gaspé ainsi que divers organismes entreprirent de vendre le chemin de fer de la Gaspésie.

 

Les premières démarches

L’affaire du chemin de fer en Gaspésie débuta avec l’honorable Honoré Mercier qui devint premier ministre de la province de Québec aux élections de 1890. Il était député du comté de Bonaventure. Comme la compagnie du Chemin de fer de la Baie des Chaleurs, présidée par le sénateur Théodore Robitaille, ancien lieutenant-gouverneur4, n’achevait pas les travaux commencés, Honoré Mercier résilia les contrats de cette compagnie et lui en substitua une nouvelle. Cependant, il ne s’en occupa nullement. Des courtiers et des intermédiaires politiques touchèrent des commissions comme celle de 100 000 $ à Ernest Pacaud afin de payer les frais d’élection et les dettes contractées par des amis du gouvernement.5

De fait, un scandale éclata, car une Commission royale fut instituée pour tout savoir sur la compagnie du Chemin de fer de la Baie des Chaleurs. À la suite de ce procès, l’honorable Honoré Mercier fut révoqué, en plus de son cabinet. Cela constitua un moment historique pour la Gaspésie : Honoré Mercier, révoqué par le lieutenant-gouverneur Angers, fut remplacé par M. Charles-Eugène Boucher de Boucherville.6

Ce scandale aura de longues répercussions et pèsera sur la carrière parlementaire des députés gaspésiens. Edmund-James Flynn, député de Gaspé de 1892 à 19 007, siégeant comme ministre dans le cabinet de M. Charles-Eugène Boucher de Boucherville puis, dans celui de M. Louis-Olivier Taillon, a dû subir les contrecoups de ce chemin de fer de la baie des Chaleurs. Par exemple, en 1896, lorsqu’il devint premier ministre de la province de Québec, son élection ne fut pas facile. C’est à cause de son prédécesseur, M. Taillon, qui avait marqué la province par une politique draconienne en matière ferroviaire. M. Flynn voulut abandonner cette politique, car des marchands de bois, des entrepreneurs, des députés provinciaux et fédéraux ainsi que des curés exercèrent de fortes pressions sur lui pour éliminer le favoritisme.

Flynn savait que le public s’intéressait à la ligne de la baie des Chaleurs, l’une des plus mal en point, ayant comme caractéristique, l’insolvabilité. Comme la compagnie en place renonçait à toute exploitation, il ne vit qu’une solution : c’était l’achat de la ligne par l’Intercontinental8. M. Flynn, voulant satisfaire l’opinion des Gaspésiens, entreprit des démarches à Ottawa, rappelant au gouvernement de Sir Wilfrid Laurier, la promesse du gouvernement Tupper. Un extrait des débats de la Chambre des communes du Canada fut très explicite de cette promesse : « Ceux qui ont étudié un peu la question savent bien que la région que l’on se propose de faire valoir au moyen du chemin de fer de la baie des Chaleurs est très éloignée de l’Intercontinental et que les communications y sont excessivement difficiles, et nous croyons que non seulement le développement de cette partie du pays facilitera le commerce et les affaires d’un circuit considérable, mais, en rendant plus faciles les communications avec l’Intercontinental, il apportera en même temps à celui-ci un immense trafic qui, autrement, ne s’y rendrait pas. (…) On a l’intention de prolonger cette ligne, non seulement jusqu’à Paspébiac, mais jusqu’ (…) au bassin de Gaspé. »9

Des marchands de bois publieront, dans le journal Le Soleil un article pour appuyer les démarches de M. Flynn, premier ministre du Québec. Ce court extrait démontrait très bien toute l’importance mise sur cette vente : « Aucun développement commercial ne sera passible en Gaspésie tant que la situation de cette voie ne sera pas changée. »10 De même, l’authenticité des démarches du premier ministre du Québec se vérifia en parcourant le courrier qui fut échangé entre son gouvernement et celui d’Ottawa.

De toute évidence, Edmund-Flynn, premier ministre et député de Gaspé, connaissait mieux que tous la condition de la Gaspésie. Dans le rapport du comité du Conseil exécutif, lequel fut approuvé par le lieutenant-gouverneur, J.A. Chapleau, le 26 mai 1896, on peut y découvrir toute la pensée de M. Flynn et de son cabinet.11<1sup>

Le comité déclarait au premier ministre et au secrétaire d’État du gouvernement du Canada, l’honorable Sir Charles Tupper, que la compagnie du Chemin de fer de la Baie des Chaleurs, compagnie d’ailleurs subventionnée par Québec, était réputée insolvable et se trouvait dans l’incapacité de continuer l’entreprise et l’exploitation de ce chemin. Cette compagnie avait, de fait, discontinué son service depuis six mois environ. La solution était la vente de ce chemin de fer, par autorité de justice, comme le gouvernement du Québec en avait le droit de par la section 2 de l’Acte 56 Vic., ch. 36.12<1sup>

En plus, ce rapport du comité du Conseil exécutif rappelait au Parlement fédéral par l’Acte 47 Vict., ch. 8, qu’il avait autorisé la dépense de 300 000 $ pour la construction d’un embranchement de l’Intercontinental partant de Matapédia vers Paspébiac en 1884. Ces quatre-vingts milles de chemin étaient encore capables de recevoir des convois de voyageurs et de marchandise.13<1sup>

Alors, le comité ajouta qu’il conviendrait d’en faire bénéficier le public de cette importante région qu’est la Gaspésie. Il ne fallait surtout pas que les efforts du passé fussent vains et stériles. D’abord, il fallait assurer l’exploitation régulière de ce chemin, tout en le continuant jusqu’au Bassin de Gaspé. D’ailleurs, par l’Acte fédéral 54-55 Victoria, ch.97, le Chemin de fer de la Baie des Chaleurs avait été déclaré être une entreprise d’un avantage général par le Canada en entier.14 C’est pourquoi, le rapport, au nom du lieutenant-gouverneur, J.A. Chapleau, proposa à Sir Charles Tupper d’incorporer le chemin de fer de la baie des Chaleurs à l’Intercontinental en plus de construire le reste de la voie jusqu’au Bassin de Gaspé.

Une réponse fut envoyée par Joseph Pope, sous-secrétaire d’État, le 1er juin 1896.15 Alors, ce fut une déception, car aucune promesse d’une décision ne fut prise à ce moment. Ce ne fut que le 11 juin 1896 que le député Flynn, après avoir envoyé un télégramme le 10 juin16 à Sir Charles Tupper, lui demandant la position du Parlement fédéral, sut la position du Parlement fédéral. Sir Tupper lui répondit qu’il ne pouvait rien faire à ce sujet sans une Assemblée législative.17 Cette réponse lui permettait de ne pas préciser radicalement sa position, à savoir s’il acceptait de concourir aux vues de M. Flynn sur le sujet urgent de la ligne de la baie des Chaleurs.

Le député Flynn reçut la même réponse de la part du ministre des Chemins de fer et Canaux. Il déclara « qu’il s’agit d’une question que le Parlement seul peut décider. »18 Cependant, il ajouta qu’il était d’accord pour garder cette question en considération d’une manière spéciale. C’était une lettre du 1er juillet 1896, envoyée par M. John J. McGee, greffier du Conseil privé.

Ces démarches du premier ministre Flynn restèrent à ce point sous le gouvernement Tupper. Cependant, elles reprirent sous le gouvernement de Sir Wilfrid Laurier, plus précisément le 24 juillet 1896. Le lieutenant-gouverneur J.A. Chapleau envoya, de nouveau, le projet de l’Ordre en conseil No. 278 du 30 mai 189619 au secrétaire d’État du gouvernement du Canada. Cette missive comprenait le projet de loi, en plus d’une insistance toute particulière pour le chemin de fer de la baie des Chaleurs. Cette attention particulière fut, de nouveau, soulignée le 29 septembre 1896 par M. J.A. Chapleau, dans une autre lettre : « Je fais appel à la bienveillance de son Excellence le Gouverneur général en Conseil en me permettant d’appeler à son attention de nouveau sur ma précédente dépêche relative à cette proposition, qui est d’une importance majeure pour les intérêts les plus immédiats de la Gaspésie et les régions environnantes, de même qu’elle se rattache directement aux intérêts du commerce général du Dominion. »20

Il ajouta cette phrase très importante : « Il n’est que juste d’ajouter qu’en faisant la présente démarche, mon gouvernement n’est que l’écho des nombreuses et pressantes sollicitations qui l’assiègent pour obtenir une prompte solution de cette importante affaire. »21

 

Les démarches du député de Bonaventure, Charles Marcil

Même si le Parlement fédéral reçut toutes ces dépêches de la part du gouvernement Flynn, il ne se plia nullement aux désirs du Québec : tout d’abord, c’était l’achat du chemin de fer de la baie des Chaleurs et, ensuite, la continuation de la voie jusqu’au Bassin de Gaspé. Malgré le refus du Parlement fédéral, le Québec ne se sentit pas vaincu. Au contraire, d’autres hommes, amis des Gaspésiens, appuyèrent cette initiative du premier ministre Flynn. Un de ces grands défenseurs fut Charles Marcil, député de Bonaventure.

Charles Marcil fut député au fédéral pour le comté de Bonaventure de 1900 à 1936.22 Il avait donc l’opportunité de prononcer des discours et de faire de nombreuses démarches dans l’espoir de l’achat du chemin de fer de la baie des Chaleurs par l’État. Ce fut surtout en tant que député qu’il usa de son influence. Il pouvait parler au premier ministre du Canada, M. William Lyon Mackenzie King, ainsi qu’à tous les autres ministres, du problème réel et immédiat de la Gaspésie. Le 20 janvier 1913, il prit la parole pour présenter un tableau de l’affaire du Chemin de fer de la Baie des Chaleurs et, aussi, pour défendre les intérêts des Gaspésiens en invoquant diverses raisons pour l’achat de ce chemin de fer par l’État.

Pour Charles Marcil, le gouvernement du Canada devait s’occuper du chemin de fer de la baie des Chaleurs étant donné que, dans la pensée des auteurs de la Confédération, l’Intercontinental devait servir de trait d’union entre les provinces. Comme la Gaspésie, selon Sir Charles Tupper et Sir Hector Langevin, anciens ministres du fédéral, avait un port magnifique à Gaspé et, en plus, d’immenses ressources en pêcherie, il devenait évident que l’Intercontinental favoriserait le développement de cette partie du pays, en plus de doter le commerce d’un circuit considérable.23

Toutes ses interventions présentaient l’avantage pour le pays d’avoir accès à la Gaspésie par un chemin de fer qui serait lié au reste du Canada. Charles Marcil le savait plus que tous les autres et il l’a bien dit avec force et conviction à la Chambre des communes, comme il apparait dans cet extrait.

« Il est temps que le gouvernement fédéral s’occupe de la question et mette cette splendide région de la province de Québec, riche en ressources de toutes sortes, en communication propice et directe avec le reste du Canada. Cela ne peut pas se faire avant que le chemin de fer de Matapédia à Paspébiac soit modernisé. Il a été construit en 1885, a été mis en service et exploité régulièrement, mais il n’a pas subi d’améliorations sensibles, et il est temps que le gouvernement fédéral s’occupe de la question et la règle définitivement. »24<1sup>

Un autre aspect pour que le gouvernement s’occupa de ce chemin de fer était le prix du transport de toutes les marchandises pour cette région, lequel était très élevé. D’abord, il y avait un tarif de gare en gare qui s’appliquait de Matapédia à Paspébiac et, ensuite, un autre tarif de gare en gare de Paspébiac au Bassin de Gaspé. Cela faisait en sorte que l’acheteur à Québec avait affaire à trois chemins de fer : l’Intercontinental, le Quebec Oriental et le chemin de fer de l’Atlantique à l’ouest de Québec.25

Si l’acquisition de la voie de la Gaspésie par l’État pour la rendre tributaire de l’Intercontinental se faisait, l’importance de la Gaspésie en serait accrue, selon l’idée de Charles Marcil. Alors, il y aurait un nouveau port dans le Bassin de Gaspé, une belle ligne riveraine dans la Baie-des-Chaleurs et des communications avec la mer du côté de la péninsule de Gaspé. C’est pourquoi, il insista sur le projet de vente soumis à l’État. Il en imposait, car il voyait que ce projet réalisé mettrait l’île d’Anticosti et Terre-Neuve à quelques heures de distance. De fait, cela assurerait le développement de toute la partie orientale du Canada.26

De toute évidence, cette tâche ne pouvait s’accomplir sans l’aide financière du gouvernement fédéral, car Charles Marcil avoua que les tentatives pour construire et mettre en service le chemin de fer en Gaspésie avaient lamentablement échoué. Il le précisa bien lors d’un débat en Chambre des communes : « La (sic) statistique des chemins de fer prouve que pour les premiers cent milles du chemin de la baie des Chaleurs, l’an dernier, l’excédent provenant de l’exploitation a été d’environ 5 000 $ et qu’il y a eu une perte nette de 19 000 $ résultant de l’exploitation des autres cent milles, de Paspébiac à Gaspé. »27

Ce furent des arguments économiques qui ont été imposants, disons irrévocables, pour montrer que l’Intercontinental devait acheter le chemin de fer de cette partie du Canada. Pourquoi plus spécifiquement cette partie? Charles Marcil le marqua, à sa manière, en teintant le dossier d’un certain patriotisme gaspésien.

« Pourtant, cette péninsule de Gaspé renferme 10 000 milles carrés, la superficie d’un royaume ordinaire en Europe, et une population de près de 60 000 habitants, et nous pourrions aisément y en loger trois à quatre fois autant. Nous avons assez de bois à pâte pour alimenter pendant des années encore les fabriques de pâte de bois du Canada. Nous avons dans la Baie-des-Chaleurs les plus beaux fonds de pêche qu’il soit possible d’imaginer. (…) L’intérieur de Gaspé est vraiment une terre inconnue ou, disent ceux qui l’ont traversée, il y a de belles vallées au sol fertile, des minéraux et des dépôts houillers aussi inexploités. »28

Il défendit d’avantage sa position : « Devant cette situation, le colon gaspésien souffre car, d’un côté, le Canada offre volontiers des millions pour attirer de nouveaux colons au Canada et, de l’autre, néglige, dans la Gaspésie, le bien magnifique qui reste encore à cultiver et à agrandir. Autrefois, les gens passaient leur vie à défricher une terre afin de pouvoir la léguer aux enfants, Aujourd’hui, leurs droits ne devraient pas être méconnus, les titres de leurs descendants ne devraient pas être foulés aux pieds. »29 Pour lui, le seul moyen pour parer à ce malheur, à cette attaque aux droits des habitants gaspésiens, consistait à « introduire l’instrument du progrès moderne, la locomotive » 30, en fait l’Intercontinental.

Ainsi, dans cet espoir de liaison de la péninsule de Gaspé à l’Intercontinental, le député Charles Marcil y voyait une transformation fantastique, inconcevable, en dix ans. Malgré ces objectifs, cela demeura un « si » vu le fatalisme de la part des habitants, car ils ne pouvaient pas se rendre au marché pour vendre leurs produits agricoles. De même, la pêche n’avait plus de sens s’ils ne pouvaient pas vendre leurs poissons.

« Ce poisson vaudrait 20 cents la livre sur le marché de Montréal; mais on est obligé de le faire sécher, et sa valeur, faute de communications faciles, est réduite à 4 ou 5 cents la livre. »31 C’était une situation défavorable pour les produits agricoles et pour le poisson; ce l’était aussi pour le bois qui était sous l’emprise américaine.

« Nous avons du bois et quelques concessions forestières qui sont exploitées par des Américains. M. Cutler, de Boston, a fait des travaux importants sur quelques rivières, et des maisons considérables de Montréal ont établi des scieries dans Gaspé. »32 Donc, l’unique solution consistait en l’achat du chemin de fer de la baie des Chaleurs par l’Intercontinental, c’est-à-dire par l’État canadien. Advenant la réalisation de cette demande, selon Charles Marcil, le ministre des Chemins de fer aurait droit « à la reconnaissance éternelle des habitants de Gaspé qui la lui accorderaient de tout cœur. »33 Advenant que l’on ne reliait pas cet embranchement à l’Intercontinental, tout serait, car, M. Galinder, courtier de Londres, exploitait la ligne simplement pour ne pas la laisser à rien faire.34 Pour Charles Marcil, l’Intercontinental devait prendre de l’extension comme il se devait et réaliser ce que les Pères de la Confédération voulaient faire, c’est-à-dire établir un lien entre les différentes provinces. C’était le chemin de fer du peuple.35

Le peuple gaspésien avait besoin de cette facilité vitale qu’était le chemin de fer. Charles Marcil appuiera davantage sur ce fait le 25 avril 1914. Il fallait que l’État canadien fasse un pas en avant, car, dans cette région, tout était médiocre quant aux services.

« La voie que l’on a construite entre Carlisle et Gaspé, moyennant 3 millions, n’est, à proprement parler, d’aucune utilité. Pendant les mois d’hiver, il n’y circule qu’un train par jour et, pour des semaines à la fois, il n’est donné aucun service à la contrée. L’ancienne ligne de Carlisle à Matapédia a été construite; mais ce qu’il faut par-dessus tout, c’est un pont entre Campbellton et Cross, pour mettre la péninsule gaspésienne en communication avec l’Intercontinental à Campbellton et avec le Transcontinental à Edmundston. »36

À la suite de cette présentation du caractère déficient du chemin de fer de la Gaspésie, Sir George Foster, ministre des Chemins de fer, répondit par une pensée un peu sentimentale qui n’a nullement satisfait le député Charles Marcil.

« C’est à cause de mon admiration pour cette belle nappe d’eau que j’ai accordé 5 000 $, et que je continue à le faire, et parce que j’ai toujours aimé voir les touristes et les voyageurs s’y rendre en foule. Mais dans la situation où nous sommes, je ne saurais faire mieux que je n’aie fait. »37

En fait, cette réponse semblait ne tenir compte que de la belle nappe d’eau au lieu de l’habitant comme tel. Durant les années suivantes, elle fut celle qui resta la seule dans la bouche des divers ministres de Chemins de fer. Donc, l’achat par l’État du chemin de fer de la baie des Chaleurs ne se ferait pas tout de suite, comme les députés de Gaspé et Bonaventure ont pu le constater en 1925. Le 15 juin 1925, l’honorable Charles Marcil reparla de l’incorporation au réseau du Canadian National des deux chemins de fer de la Gaspésie, le Quebec Oriental et l’Atlantic, Quebec and Western.38 M. Marcil fit, dans cette démarche souvent répétée, l’historique des tentatives pour l’incorporation du chemin de fer de la péninsule de Gaspé à l’Intercontinental. S’il en parla à la Chambre des communes, c’est parce que la Commission des chemins de fer avait visité la péninsule pour une enquête sur l’Affaire du chemin de fer. Au cours de cette enquête, il y avait le juge McKeown, le commissaire Laurence et leur personnel attitré. En plus de cet événement, un autre fait l’avait décidé à en reparler : le ministre des Chemins de fer, M. Graham, le ministre de la Justice, M. Lapointe, et le ministre de la Santé, M. Béland, avaient accepté de rencontrer le représentant du premier ministre de la province de Québec, M. Perrault, ainsi que l’évêque de Gaspé, Mgr François-Xavier Ross.39 À nouveau, M. Charles Marcil réagit grâce aux personnes influentes qui s’intéressaient à ce problème, dont le cardinal Louis-Nazaire Bégin, archevêque de Québec, et les députés du gouvernement du Québec.

Charles Marcil fut très précis dans son discours à la Chambre des communes, invoquant des situations historiques et des faits actuels relativement pénibles. Tout fut orienté pour prouver que le chemin de fer de la péninsule de Gaspé avait besoin d’être acheté par l’État.

« Quand ces lignes ont été achevées, en 1911, il était entendu que le gouvernement Laurier devait les prendre pour les réunir à l’Intercontinental. Au cours du régime Borden, on a tenté de faire remplir cette promesse. Quand feu M. Cochrane présenta son projet de loi incorporant deux cents milles d’embranchements au réseau de l’Intercontinental on s’est trouvé prendre pour ainsi dire toutes les lignes du Nouveau-Brunswick et une ou deux dans la province de Québec, mais ces deux lignes ont été laissées de côté. Durant la guerre rien n’a été fait, mais quand le gouvernement actuel a pris le pouvoir, en 1921, le peuple de la péninsule gaspésienne a compris qu’il fallait tenter un nouvel effort pour s’assurer une part des avantages auxquels il a droit. Il ne faut pas oublier (…) que la péninsule de Gaspé est le plus vieil établissement du Dominion (…). Le peuple de la péninsule (…) pense avoir droit à cette considération (…). »40

Sur le plan économique, Charles Marcil n’a pu s’empêcher de mentionner qu’il était grand temps d’agir, car, dans un avenir rapproché, tout serait perdu. À preuve, « l’Association des marchands de bois de la province de Québec avait déménagé ses bureaux à Dalhousie et les scieries dans le comté de Bonaventure avaient été transportées à Bathurst ».41

À la suite de l’argument économique, M. Marcil a touché au point très sensible d’un peuple. Ce fut le côté départ, c’est-à-dire l’émigration de la population, surtout de la jeunesse gaspésienne. Comme cette jeunesse était la seule ressource humaine pour améliorer la Gaspésie, il fallait la retenir. C’était difficile, car, avec le départ des industries, les emplois étaient limités. Ainsi, la population « durant la dernière période décennale (…) avait diminué et l’augmentation naturelle n’avait pas dépassé 800 ».42 Il décrivait une situation déplorable, car, lorsque les industries étaient en place, la population du comté de Bonaventure avait augmenté de 5 000 personnes.43 C’est pourquoi M. Marcil a insisté avec force sur un point névralgique : « Mgr Ross et le clergé de la province de Québec s’efforcent actuellement d’ouvrir de nouvelles terres à la colonisation dans la péninsule de Gaspé, afin d’y conserver nos jeunes Canadiens qui s’en vont vers les villes ou aux États-Unis. (…) Et cette péninsule de Gaspé ne sera jamais colonisée autrement que par la population de l’endroit ou ses descendants (…). »44

Pour terminer son plaidoyer, l’honorable Marcil invoqua les arguments économiques de Sir Henry Thornton, président du Canadian National : « Sir Henry Thornton a déclaré que s’il entreprenait l’exploitation de ces deux chemins de fer, il devrait réduire les prix de transport de 25 p. 100, ce qui signifie que, depuis plusieurs années la population de Bonaventure et de Gaspé, paye le transport de ses produits 25 p. 100 de plus que les tarifs du réseau du National Canadian. »45

Le député Charles Marcil garda quand même un espoir qui dura jusqu’en 1928. Il revint à la charge encore une fois pour demander que l’Intercontinental prenne possession du chemin de fer de la baie des Chaleurs. Le 6 juin 1928, il manifesta sa joie de savoir que le ministre des Chemins de fer avait inclus le chemin de fer de Gaspé dans la liste des chemins de fer qui retenaient, principalement, l’attention du Bureau de la direction des Chemins de fer nationaux. Le seul argument qu’employa M. Marcil, lors de son intervention, fut celui du bill passé en 1915, concernant les embranchements. Le bill autorisait le gouvernement à prendre à sa charge tous les embranchements de plus de 200 milles de longueur au réseau de l’État de l’époque.46

Donc, l’honorable Charles Marcil continua ses interventions pour faire incorporer le chemin de fer gaspésien à l’Intercontinental jusqu’au résultat final en 1929. Il télégraphia, en tout premier lieu, à Mgr François-Xavier Ross, évêque de Gaspé : « Heureux de vous annoncer que l’hon. Charles Dunning, ministre des Chemins de fer, vient d’informer la Chambre de l’achat des chemins de fer gaspésiens. »47

 

Les démarches du député de Gaspé, Rodolphe Lemieux

Ce fut la récompense de nombreux efforts, comme ceux du député de Gaspé, Rodolphe Lemieux. Il fut député de Gaspé de 1896 à 1911.48 Son action comme député, en faveur de l’Incorporation du chemin de fer de la Gaspésie à l’Intercontinental, fut semblable à celle de l’honorable Charles Marcil. La lutte se fit en Chambre devant les députés de tout le Canada. Comme Charles Marcil, il était convaincu de la nécessité de doter les Gaspésiens d’une bonne voie de communication, la plus moderne à l’époque, la locomotive. Pour l’honorable Lemieux, si la Gaspésie était en retard sur les autres régions canadiennes, cela était dû à deux facteurs. Il les expliqua à la Chambre des communes le 20 janvier 1913.

D’abord, il expliqua que la péninsule a été négligée par les différents gouvernements pendant les derniers trente ou quarante ans, pour des raisons politiques. Tout d’abord, Sir Charles Tupper, ministre des Chemins de fer, avait donné à l’entreprise la construction de plusieurs milles de chemin de fer : cela avait permis de commencer les travaux. Cependant, plus tard, le gouvernement céda le tout à une compagnie particulière et abandonna l’idée de construire la ligne comme embranchement de l’Intercontinental.49

Ce fut le premier facteur de ralentissement. Le deuxième, selon l’honorable Lemieux, c’en fut un plus important, c’est-à-dire qu’il conditionnait de beaucoup le premier facteur. C’était la présence, en Gaspésie, des gens venant de Jersey. Il expliqua ce fait en ces mots : « Je me suis laissé dire par les anciens des comtés de Gaspé et de Bonaventure que si, à l’époque, le gouvernement a abandonné les travaux de la voie comme embranchement de l’Intercontinental, c’est à cause d’une vive opposition de la part des maisons de Jersey, pour lesquelles la pêche se fait le long de cette côte. (…) Ils sont tous venus ici au temps de la domination française et on les retrouve encore aujourd’hui. (…) Leur opposition était due à ce que, ayant besoin d’une main-d’œuvre à bon marché, ils ont craint qu’une fois le chemin de fer établi, on ne préférât se livrer à d’autres occupations, et que leur commerce se fit à perte. J’ai toujours entendu dire que c’était là le nœud de la difficulté. Si les maisons de Jersey n’avaient pas été dans son chemin, le gouvernement aurait depuis longtemps fait l’acquisition de la ligne de Matapédia au Bassin-de-Gaspé, comme il en avait eu l’idée dans le principe. »50

Ce fut un nouvel élément de compréhension dans cette affaire de la Gaspésie. Cela démontrait le pourquoi du peu d’encouragements de la part du gouvernement. Les Gaspésiens en subirent des contrecoups. À titre d’exemple, l’honorable Lemieux, en 1913, expliqua, avec précision, que la compagnie qui administrait la voie de Matapédia à Paspébiac s’était fait enlever sa charte par le gouvernement fédéral à cause de nombreux déficits.51

Selon divers rapports, ce chemin de fer de Matapédia qui se rendait à Paspébiac n’était presque plus utilisable. D’ailleurs, il ne l’était pas pour le train qui faisait le trajet de Paspébiac à Gaspé, une distance de 102 milles. Cette dernière ligne fut construite à l’aide de subventions du gouvernement fédéral et par des millions de dollars venus de l’Angleterre. Ce furent des ingénieurs anglais qui construisirent cette voie modèle, c’est-à-dire un chemin de fer de premier ordre qui pouvait se comparer avantageusement avec l’Intercontinental.52

Il en découlait une grande difficulté vu cette voie modèle. Le public qui voyageait et les gens qui envoyaient ou recevaient des marchandises par cette voie avaient à payer trois fois : d’abord, à l’Intercontinental, puis à la section de Matapédia et, ensuite, à celle de Gaspé. C’était vraiment l’embarras du système. Il ne fallait qu’une seule ligne depuis Gaspé à Matapédia.

Cette situation défavorable et dramatique pour les Gaspésiens à cause de ce système de chemin de fer fit hésiter l’État fédéral à la régler. D’un côté, il fallait refaire une partie du chemin de fer du comté de Bonaventure; de l’autre côté, il fallait prouver que l’achat de ce chemin de fer serait profitable monétairement, donc rentable. Ce dernier aspect ne fut pas facile à prouver si l’on se référa à ce qu’a dit l’honorable Lemieux : « La compagnie avait comme bailleur de fonds M.A. W. Carpenter, de la banque Charing-Cross. Cette banque a failli, il y a deux ans, et, dans la liste de ses obligations, figure le nom du chemin de fer Atlantic, Quebec and Western. M. Carpenter avait placé des fonds considérables, non seulement au Canada, mais dans l’Afrique du Sud, dans les mines et même en Asie. Il a été malheureux dans beaucoup de ses entreprises et le chemin de fer de Gaspé est un des nombreux projets qui ont mené la faillite. »53

Devant ce fait, il ajouta qu’une nouvelle formule fut essayée, celle du syndic. Cela n’a guère réussi vu les résultats. Il en expliqua les raisons : « Les créanciers de la banque ont nommé deux syndics, à savoir : Sir William Plender et Sir William B. Peat. (…) Le chemin est aujourd’hui sous leur administration. (…) mais elle fonctionne dans des conditions très désavantageuses. Il ne saurait être ainsi longtemps administré par des syndics. Ils dépensent de l’argent et ne recueillent que des déficits, à cause de la lacune qui existe entre Matapédia et Paspébiac. »54

Malgré ces résultats pas trop encourageants, le député Rodolphe Lemieux n’hésita pas à suggérer que, si le chemin de fer obéissait à une direction unique ou était cédé à l’Intercontinental, on aurait une entreprise lucrative. C’est avec énergie qu’il s’adressa à la Chambre des communes, paroles qui décrivaient toute la situation.

« Ce qu’il faut, ce sont des mesures éco-énergiques, et il y va de l’intérêt du pays de donner par une loi à cette magnifique contrée les chemins de fer dont elle a besoin pour son développement. Il en existe un bon à l’heure qu’il est, entre Gaspé et Paspébiac, une voie excellente, de beaux ponts du modèle le plus récent, et une administration économique. Mais dès que l’on arrive au comté de mon honorable ami (M. Marcil), à Paspébiac, on ne se soucie plus de prendre le train. »55

Il ajouta qu’un député, devant cet état de chose publique, ne pouvait pas oublier que ses électeurs étaient des citoyens à part entière au Canada, c’est-à-dire des payeurs de taxes. « Les populations de l’État méritent cela (achat de ses lignes de voies ferrées par l’État) : elles ont depuis des années payées des taxes, qui ont servi à la construction de voies ferrées dans d’autres provinces et elles ont sûrement droit aujourd’hui de recevoir quelque chose du gouvernement. »56

C’est pourquoi, le 1er mai 1914, il demanda l’intervention du gouvernement dans cette affaire qui devenait de plus en plus désastreuse, car, à cause du triste état où se trouvait la première section de la voie ferrée, la Gaspésie ne pouvait prospérer. Seul le gouvernement pouvait améliorer cette situation néfaste d’une partie du Canada, partie qui avait été privée de communications par voies ferrées pendant quasi un demi-siècle. Il fallait bien se souvenir, nota le député Rodolphe Lemieux, que Gaspé était l’un des plus vieux comtés de la puissance du Canada. En plus, Gaspé, au 16e siècle, fut le premier endroit où Jacques Cartier débarqua.57

La réponse de M. Reid, représentant du ministre des Chemins de fer, donnée à la suite de l’intervention de M. Rodolphe Lemieux, fut non compromettante, comme toutes les réponses faites au député de Bonaventure, Charles Marcil,

« La loi concernant les lignes d’embranchements qui figure maintenant aux Statuts n’autorise pas l’acquisition de nouvelles lignes d’embranchement sans autorisation législative, et je ne voudrais pas assumer la responsabilité de faire de nouvelles démarches (…) »58 Et il ajouta, pour manifester son approbation au sujet débattu sur l’heure, que « bientôt, j’espère, sonnera l’heure où l’État sera en mesure de prendre à sa charge quelques-uns de ces embranchements ».59

Tous les députés savaient que les embranchements étaient nombreux au Canada et que beaucoup de compagnies sollicitaient le gouvernement pour des subventions et même pour des achats. Les chemins de fer de la péninsule de Gaspé faisaient partie du groupe sur la liste du gouvernement fédéral pour leur incorporation à l’Intercontinental. S’ils étaient inscrits sur la liste, ce fut parce que, à l’époque de la Confédération, le gouvernement avait permis l’Intercontinental aux provinces des Maritimes. Le gouvernement avait construit cette ligne avec l’entente qu’un embranchement serait prolongé de Matapédia au Bassin-de-Gaspé, sur une distance de 200 milles. C’était un des arguments de base du député Rodolphe Lemieux, lors de la session de la Chambre des communes, en mai 1918. Pour le député, le comté de Gaspé était considéré comme une partie des provinces des Maritimes, en ce sens qu’au début du 18e siècle, Gaspé formait une province séparée.60 « Ce n’est seulement que par l’Acte de 1791, si je ne me trompe, que Gaspé a été annexé à la province de Québec et, pendant un certain temps, je crois qu’il a fait partie du Nouveau-Brunswick. Nous avons eu un gouvernement autrefois à Gaspé. »61

Pour le député Lemieux, la Gaspésie était une très belle et grande péninsule. Il comparait la Baie-des-Chaleurs à la Méditerranée avec les Alpes à l’arrière-plan. Cette région avait des industries florissantes comme l’industrie de la pêche et l’industrie de la pâte de bois. En plus, il y avait une minéralisation importante et intéressante à exploiter entre Newport et New Carlisle. D’ailleurs, un groupe de capitalistes montréalais, le Syndicat Peter-Lyall, voulait exploiter une mine de cuivre.62 Donc, toute cette démonstration du député Rodolphe Lemieux permit de demander au gouvernement d’acquérir des embranchements où c’était nécessaire, comme en Gaspésie. En 1911, il fut député de Maisonneuve, ce qui ne l’empêcha pas de s’occuper de ce projet gaspésien. Il donna son entière approbation aux démarches faites par un de ses amis du comté de Gaspé, Mgr François-Xavier Ross, évêque de Gaspé. Il reconnut que cet évêque fut un de ceux qui a le plus travaillé pour la Gaspésie sur tous les plans. Il avait la certitude que Mgr Ross était un signe que la Providence n’avait pas abandonné les Gaspésiens. L’historien, Robert Rumilly, dans son livre La Gaspésie, le mentionna à son tour : « Cultivateurs et pêcheurs étaient presque aussi pauvres qu’à l’époque de la Confédération. Les compagnies commerciales, acheteurs et fournisseurs uniques, sous une direction étrangère, maintenaient la population dans un état d’anémie, matérielle et morale. Mais la Providence n’abandonna pas la Gaspésie. »63

 

Les démarches de Mgr François-Xavier Ross, évêque de Gaspé

Cette manifestation de la Providence fut l’arrivée de Mgr François-Xavier Ross en 1923 pour fonder le diocèse de Gaspé. Ce diocèse comprenait deux comtés, celui de Bonaventure et celui de Gaspé. Ce premier évêque de Gaspé, natif de Grosses-Roches, dans le comté de Matane, naquit le 6 novembre 1869. Il fut sacré évêque à Rimouski le 1er mai 1923.64 Antoine Bernard, dans son livre paru en 1925, écrivit un commentaire particulier sur cet homme : « De nom, Mgr Ross est Écossais, c’est entendu. Mais What is in a name?… Tout au plus ce vocable du Highland rappelle-t-il la conquête pacifique que firent les Canadiens après l’autre conquête, celle de 1760… Résultat pratique : après cinq ou six générations, les Écossais des plaines d’Abraham se sont fondus dans l’élément franco-canadien, dont ils ne sauraient en aucune manière se distinguer. Mgr Ross fournit une preuve typique. »65

Éducateur distingué, fervent patriote, Mgr François-Xavier Ross savait qu’il ne trouverait ni évêché ni séminaire à Gaspé. En plus, il devait organiser le diocèse sans toutefois surcharger une population peu fortunée. Il ajoutait à sa tâche le développement de la colonisation par la construction de routes et des voies ferrées à l’intérieur de la péninsule reliant Amqui à Gaspé. Le frère Antoine Bernard le décrivit très bien dans son livre La Gaspésie au Soleil : « Son courage, son savoir-faire furent, dès les premières heures, à la hauteur de sa mission. »66

Mgr Ross démontra une grande connaissance de ce qui manquait à la Gaspésie. Il l’écrivit très clairement dans sa lettre circulaire au clergé de son diocèse, le 21 juillet 1923. « Il y a la question du chemin de fer, toujours administré par des compagnies qui le tiennent ouvert à la circulation pour ne pas perdre tout ce qu’elles ont jeté dans cette entreprise, mais qui sont incapables de renouveler ou améliorer leur matériel, d’offrir une plus grande sécurité aux voyageurs, de répondre aux besoins du trafic et d’abaisser leurs tarifs. »67

En s’exprimant ainsi, Mgr Ross démontrait que, dans la Gaspésie, les gens étaient « encore au temps où rien ne se fait si le clergé ne prend pas les devants ».68 Il voyait indispensable l’action des prêtres sur le terrain économique bien qu’elle ne devait pas absorber ni dénaturer leur vie sacerdotale. Le plus souvent, Mgr Ross s’en doutait, c’était le prêtre qui devait être l’initiateur et qui devait préparer les laïcs à conduire leurs affaires. Il remarqua que ce fut un processus lent, plus lent qu’ailleurs. C’est pourquoi, dès le début, il s’attaqua à la colonisation qui était une base importante pour continuer son œuvre sociale. Alors, il mit beaucoup d’efforts au mouvement coopératif et à l’exploitation ferroviaire.

Quant à cette dernière, il a agi rapidement dès 192369, en allant rencontrer les députés du gouvernement King. En fait, il renouvelait les démarches accomplies par le député Flynn, premier ministre de la province de Québec et député de Gaspé, lequel avait fait des démarches auprès des gouvernements Tupper et Laurier. Le conseiller législatif John Hall Kelly et les quatre députés intéressés – Rodolphe Lemieux, Gustave Lemieux, Charles Marcil et Fabien Bugeaud – approuvèrent et secondèrent Mgr Ross qui voulait, à son tour, obtenir l’achat par le gouvernement fédéral de la désolante voie côtière de Matapédia à Gaspé.

Comme le dossier des chemins de fer canadiens causait des ennuis politiques au gouvernement de M. King, il décida de le confier à Sir Henry Thornton.70 Ce dernier était un Américain de naissance, lequel s’était distingué en Grande-Bretagne comme responsable des Services ferroviaires, pendant et après la Deuxième Grande Guerre mondiale. Au Canada, le gouvernement lui donna la responsabilité du système ferroviaire. De ce fait, il avait le pouvoir de prendre toutes les décisions majeures. Pour les Gaspésiens, M. Thornton était le politicien à approcher. Le député Lemieux l’invita à une assemblée tenue dans l’église de Bonaventure. Cette assemblée était sous l’initiative de Mgr Ross, car il voulait parvenir à l’incorporation du chemin de fer de la baie des Chaleurs à l’Intercontinental.

Cette assemblée fut mémorable, car plusieurs personnes du village y assistèrent. Pour elles, ce fut un moment marquant pour la Gaspésie. Cette rencontre donna une ampleur quasi provinciale au problème gaspésien. Mgr Ross y exposa toute la question du chemin de fer devant des hommes politiques, des marchands de bois, des cultivateurs et des pêcheurs de la Gaspésie. Grâce à cette assemblée, selon Robert Rumilly, Mgr Ross assumait vraiment et tout naturellement, sous un aspect moderne, la fonction de chef et de protecteur de son peuple.71 Il prononça un plaidoyer vigoureux et émouvant dont quelques passages suffisent pour mettre en lumière le rôle du clergé dans la Gaspésie du temps et aussi la situation déplorable de cette partie du Canada à cause du manque de chemin de fer. En plus, Mgr Ross proposa une solution adéquate pour résoudre ce grand problème.

Tout d’abord, Mgr Ross s’adressa à Sir Henry Thornton pour le saluer, le remerciant de sa présence. Par cette rencontre, il voulait lui faire connaître l’ambiance gaspésienne. Ce texte parut dans le journal Le Devoir. « Sir Thornton, nous aimons voir dans cette démarche un témoignage de sympathie à notre égard; nous osons espérer et formuler le vœu que, ne vous arrêtant pas seulement à considérer les dépenses immédiates que pourraient occasionner l’acquisition du chemin de fer, vous éleviez vos vues plus haut et les étendiez plus loin et fassiez entrer en ligne de compte les souffrances d’un peuple que le gouvernement doit acquérir, parce qu’il est arrêté dans son développement, et le fait qu’une voie améliorée provoquera dans notre riche région, un développement dont bénéficieront nécessairement le Gouvernement qui l’aura accordé et les chemins de fer nationaux qui trouveront dans cette artère une source inexplorée de revenus. »72

Dans cette partie de souhaits de bienvenue aux représentants de diverses fonctions publiques, Mgr Ross leur parla d’une manière émouvante et digne d’un chef ecclésiastique. Il toucha le cœur des hommes devant lui, au cœur des Fils de Dieu.

« Si nous voyons groupés ici, sur un simple appel et dans un même intérêt, les représentants autorisés des diverses classes d’un territoire quasi vaste qu’une province, c’est que la question que nous avons mise à l’affiche est une de celles qui tiennent au développement et à l’avenir d’un peuple qui a souffert, qui souffre encore et qui croit voir se lever l’aurore d’un jour radieux où il lui sera enfin permis de s’épanouir librement sous le soleil du bon Dieu, dans sa belle et riche nature où la Providence a fixé sa destinée. »73 Après ce cri du cœur, il précisa le but de cette assemblée qui prêtait à confusion pour certains.

« Cette assemblée, messieurs, (…) n’est ni une assemblée politique, ni une assemblée de récriminations, ni même une assemblée de parade destinée à jeter un éclat qui s’éteindra avec le jour qui l’aura vue briller. C’est le mouvement d’un peuple qui se sent mourir, frappé dans les sources de vie, sentant son organisme économique disloqué et paralysé, perdant son sang avec la fuite des milliers d’enfants qui désertent le sol. (…) Rien ne nous divise et nous voulons simplement nous concerter sur le moyen d’améliorer la situation de la Gaspésie en faisant pression auprès du gouvernement pour le décider à acquérir notre chemin de fer et à le faire entrer dans le réseau des Chemins de fer nationaux. (…) Tout ce qui sera dit au cours de cette assemblée démontrera que c’est actuellement l’unique moyen de régler une question qui est une question de vie ou de mort pour la Gaspésie. (…) »74

À la suite de cette présentation détaillée de la situation et de la présentation de l’unique solution pour la Gaspésie qui était en droit d’attendre une règlementation par le gouvernement, Mgr Ross présenta les avantages découlant de cette règlementation idéale pour la Gaspésie. Selon Mgr Ross, ce règlement définitif par le gouvernement aurait des répercussions pour la province de Québec, même pour le Canada tout entier. Il alla jusqu’à faire une profession de foi quant à l’avenir du diocèse de Gaspé.

« Nos chances de succès nous viennent encore de l’importance que prend la Gaspésie, et la place qu’elle pourrait occuper dans la province et la Confédération si elle était favorisée des moyens de communications que l’on possède ailleurs; nous avons une population de 70 000 habitants; nos forêts, nos mines, nos pêcheries, notre sol cultivable en font l’une des plus riches parties de la province; nous avons des ports de mer qui, tôt ou tard, devront attirer l’attention des compagnies de transport transatlantique. Nos sites naturels la posent aux yeux des étrangers comme le paradis terrestre des touristes. Un siège épiscopal vient d’être érigé. Et, messieurs, je ne crois rien de dire de trop, même aux oreilles de ceux qui ne partagent pas notre foi, la création d’un siège épiscopal dans notre pays, et dans notre province en particulier, signifie élan et progrès dans tous les domaines de l’activité d’un peuple. Bientôt nous aurons notre séminaire diocésain à côté de l’évêché de Gaspé, une école normale pour la formation professionnelle du personnel enseignant; d’autres institutions surgiront à mesure que les conditions économiques nous en permettront la réalisation : tout cela suppose la facilité des communications, qui met ces institutions à la portée de tout le monde, et un déploiement de ressources, pour peu qu’on nous en facilite les moyens. »75

Pour Mgr Ross, cette rencontre ne se limitait par seulement à demande au gouvernement de faire l’achat du chemin de fer de la Gaspésie. Ce qui comptait avant tout, c’était de créer une union forte des Gaspésiens devant le gouvernement. Cette condition était essentielle pour le succès des démarches actuelles. Il le dit très simplement en s’adressant aux Gaspésiens, avec une franchise déroutante : « Que nous manque-t-il pour pouvoir réaliser nos vœux? Il ne nous manque que la troisième des conditions de succès (…) : l’unité de vues dans notre action commune, et la persévérance obstinée dans nos réclamations. À vous de me dire si je puis compter là-dessus. »76

Quand Mgr Ross utilisa le mot persévérance, il le savait très bien : les Gaspésiens avaient cette caractéristique. Il en donna l’exemple par sa propre implication. De fait, il n’avait pas attendu l’achat du chemin de fer par l’État pour agir : il fonda des coopératives; il construisit des écoles et des chapelles partout en Gaspésie. Il invita les Ursulines de Rimouski à ouvrir un pensionnat à Gaspé.77 Évidemment, comme la Gaspésie ne devait se bâtir qu’avec ce qu’offraient la vapeur, l’électricité et l’insuffisance des communications ferroviaires, ses efforts furent très difficiles et ses projets stagnèrent. C’est pourquoi, le 7 février 1925, il conduisit une délégation à Ottawa. Le député Rodolphe Lemieux s’occupa de présenter au premier ministre et à ses collègues cette délégation formée du ministre provincial de la Colonisation, Joseph-Edouard Perreault, les deux députés de Bonaventure Charles Marcil et Pierre-Émile Côté, les deux députés de Gaspé, Rodolphe Lemieux et son frère Gustave Lemieux, les conseillers législatifs John Hall Kelly et Philippe Paradis, ainsi que diverses personnalités locales.78

Cette intéressante et imposante délégation prouva l’importance de la démarche de Mgr Ross. D’ailleurs, il l’expliqua lors de la présentation de son mémoire : « J’ai entrepris, dit-il, d’organiser ce coin de terre. Nous construisons un collège, nous établissons des colons, nous fondons des paroisses; tous ces efforts resteront vains, la péninsule gaspésienne ne progressera pas sans communications convenables. »79

L’argument principal de Mgr Ross, selon le député Charles Marcil, député de Bonaventure, démontrait que la décision de Sir Henry Thornton au sujet de l’incorporation de ces voies dans le réseau national était uniquement basée sur les recettes et les dépenses sans tenir compte des considérations générales qui auraient pu influencer le gouvernement.80

En réponse à cette demande, Sir Henry Thornton proposa la solution suivante : louer le chemin de fer gaspésien pour 99 ans.81 Mgr Ross trouva cette solution insuffisante et la refusa. Il ne fut pas le seul à la refuser : les compagnies anglaises envoyèrent des contre-propositions. Ainsi, chaque partie déclara les conditions de l’autre inacceptables. Toutes ces démarches et ces querelles eurent pour effet d’oublier la Gaspésie lointaine.

Cependant, d’autres démarches s’amorcèrent, moins fracassantes et éclatantes, mais plus sûres et solides, par Mgr Ross. Il procéda par des requêtes qui furent signées par les gens des comtés de Gaspé et de Bonaventure. En plus, il écrivit une lettre circulaire au clergé gaspésien, le 18 décembre 1926. Dans cette lettre, il montra une nouvelle ardeur très convaincante, un souffle de vie illimité, un goût pour le mieux-être des Gaspésiens, un sentiment de justice fort qu’il voulait donner à ses prêtres et à ses diocésains. Il prouvait qu’il était décédé à ne pas être exploité et à ne pas demeurer en silence devant le gouvernement.

« La question de notre chemin de fer ne sera considérée comme morte et enterrée que le jour où nous cesserons de l’agiter. La vie est dans le mouvement. Mon intention est bien de la tenir à l’affiche aussi longtemps que le gouvernement fédéral, qui a acquis tous les embranchements de nos voisins du Nouveau-Brunswick et qui propose de nouvelles constructions et acquisitions, n’aura pas fait disparaître cette injustice qui crève les yeux. Il ne s’agit pas ici de faire la guerre à un gouvernement ou à un parti; nous réclamons des hommes au pouvoir, d’être traités comme les autres groupes de la Confédération. Nous avons aidé à la construction, à l’achat des chemins de fer nationaux, nous avons contribué à combler leurs difficultés et nous les aidons à faire des surplus; nous demandons que les autres parties du pays nous rendent un peu ce que nous leur avons fait. C’est toujours notre tour à payer et à ne rien recevoir de la politique ferroviaire du pays. Mais il serait trop long d’énumérer ici tous nos droits et toutes nos raisons de nous plaindre. Je voulais simplement vous signaler que bientôt des requêtes circuleront dans les deux comtés pour reprendre nos réclamations. Les conseils municipaux devront y prendre part par des résolutions corporatives. Je compte que vous mettrez tout en œuvre afin de créer un mouvement d’ensemble assez imposant pour donner suite à l’émotion qui nous a valu des égards particuliers au cours des derniers événements politiques. N’attendons pas qu’on vienne nous offrir un chemin de fer : allons le chercher. »82

En plus de ce mouvement par des requêtes, Mgr Ross parcourut la province de Québec pour sensibiliser les gens au problème fondamental de la Gaspésie : le chemin de fer. Par exemple, le 8 février 192783, il donna une conférence sur la Gaspésie, son état et ses besoins, dans la salle académique du Gésu à Montréal, sous la présidence du recteur Lalande. M. Lalande le présenta avec humour et sincérité, croyant en sa cause : « Nous allons tous nous unir pour le transformer, lui, ses chevalets branlants et ses viaducs vermoulus, ou bien pour le faire disparaître et obtenir un beau C.N.R. tout neuf. »84

De toute évidence, cette conférence de Gésu fut encourageante pour Mgr Ross et pour les Gaspésiens. Elle déclencha un mouvement dans l’opinion à l’échelle du Québec. Tout d’abord, à Montréal, l’Association catholique des Voyageurs de commerce fit, publiquement, la demande au Gouvernement du Canada de nationaliser le chemin de fer de la Gaspésie.85 Ensuite, la Chambre de commerce de Sayabec, devant la ténacité des Gaspésiens, envoya une lettre au député Charles Dunning, ministre des Chemins de fer, en 1927, soulignant qu’elle ne pouvait pas comprendre « comment il se fait que les chemins de fer nationaux achètent constamment de nouvelles lignes dans l’Ouest ».86 Alors, un questionnement survint au sujet de l’embranchement de la baie des Chaleurs. Devant ces forces vives réclamant l’achat par l’État du chemin de fer gaspésien, Sir Henry Thornton décida d’en faire l’achat. Il prépara, en Angleterre, l’achat des deux lignes d’une centaine des milles chacune, de Gaspé à Paspébiac et de Paspébiac à Matapédia. Le prix en fut de trois millions et demi de dollars.87

Sir Henry Thornton présenta le projet au Comité des chemins de fer qui l’accepta. À la suite, la Chambre des communes le ratifia, malgré l’opposition de Henry Herbert Stevens, député de Vancouver, et de Robert Gardiner, Chef des fermiers de l’Alberta. Le député Gardiner en donna cette raison : « Les chemins de fer de la Gaspésie ne paieront jamais. »88

Le chemin de fer de la baie des Chaleurs fut désormais sous la direction du Canadian National. Dès lors, les Gaspésiens purent espérer à une véritable croissance économique. Ce fut, tout spécialement, sous l’impulsion de son évêque, Mgr François-Xavier Ross.

 

Une histoire des efforts de la part de nombreux acteurs

L’histoire de la vente du chemin de fer de la baie des Chaleurs a été réalisée par des hommes qui concentrèrent leurs énergies pour le bien-être des Gaspésiens. Le député de Gaspé, Rodolphe Lemieux, le premier ministre du Québec et député de Gaspé, Edmund-James Flynn, et le député de Bonaventure, Charles Marcil seront les principaux intervenants auprès du gouvernement fédéral à Ottawa. Edmund-James Flynn communiqua souvent par courrier. Les députés Rodolphe Lemieux et Charles Marcil prononcèrent des discours à la Chambre des communes. Tous cherchèrent à influencer le gouvernement fédéral pour incorporer le chemin de fer de la baie des Chaleurs à l’Intercontinental.

Une autre personne très importante travailla à ce projet, Mgr François-Xavier Ross, évêque de Gaspé. Il orienta ses efforts et les diverses forces – le clergé et les citoyens – pour obtenir cette incorporation. Il entreprit des démarches auprès du gouvernement fédéral dirigé par William Lyon Mackenzie King. En plus, il s’adressa directement à la population du Québec, expliquant la situation de la Gaspésie, ce qui a permis un résultat probant comme la participation de divers organismes laïcs comme la Chambre de commerce de Sayabec. Ses efforts unis aux députés permirent de finaliser ce projet de vente du chemin de fer des Gaspésiens, ce qui leur permettait une survie économique et sociale.

Ce fut l’histoire des démarches des grands hommes politiques et religieux de la Gaspésie. Cette histoire peut, sans nul doute, démontrer aux générations suivantes l’immense dévouement et le côté nationaliste de ces hommes qui voulaient améliorer la vie des gens qui passait, à l’époque, par le chemin de fer.

Après ce succès, l’action des députés et des prêtres se décrirait très bien en utilisant un extrait du discours de Mgr François-Xavier Ross lors d’une intervention à la Chambre des communes à Ottawa. « Notre action doit (…) être persévérante c’est-à-dire qu’il faut lutter jusqu’au bout sans jamais démordre, et si nous devons essuyer un échec, deux ou plusieurs échecs, que nous soyons prêts à chaque fois à recommencer avec plus de ferveur qu’à la précédente. »89

Cet autre extrait d’un article du journal Le Devoir démontre bien la ténacité de Mgr François-Xavier Ross qui resta debout, tel un défenseur des droits des Gaspésiens. « Il faut que le gouvernement l’entende cette voix vibrante, tonnante, ahurissante, afin que, comme l’ami dont parle l’Évangile, il finisse par nous accorder ce que nous demandons, sinon par sympathie, au moins pour se débarrasser de nos importunités. »90

Notes

  1. MILLER, Émile, Terres et Peuples du Canada, Beauchemin, Montréal, 1924, 125 p., pp. 78-79.
  2. BOISSEAU, Lionel, La mer qui meurt, Éditions du Zodiaque, Montréal, 1939, 208 p., p.44.
  3. BUIES, Arthur, La Vallée de la Matapédia, Imp-Ed. Léger Brousseau, Québec, 1895, 52 p. p. 35.
  4. TRÉPANIER, Léon, « Le Scandale de la Baie des Chaleurs », Revue d’Histoire de la Gaspésie, vol. 1, no.3, Juillet-septembre, 1963, p.144.
  5. Ibid., p. 144.
  6. Ibid., p. 144.
  7. LEMOIGNAN, Michel, « Les Députés de la Gaspésie (1792-1963) », Revue d’Histoire de la Gaspésie, vol. 1, no. 3, p. 141.
  8. RUMILLY, Robert, Histoire de la Province de Québec, vol. V111, Wilfrid Laurier, Bernard Valiquette, Montréal, pp. 117-118.
  9. Compte rendu officiel des Débats de la Chambre de Communes du Canada, 2esession, 12e Parlement, 3-4 George V, 1912-1913, vol. CV11, Bibliothèque du Parlement, Ottawa, vol. 1, 1912-1913, col. 1822.
  10. RUMILLY, Robert, « La Gaspésie », Le Soleil, Québec, 1944, 181 p., p.12.
  11. Documents de la Session, Réponses aux adresses, vol. 30, 111, 1896, Réponse no. 52, Québec, 60, Victoria, A.D. 1896-97, Rapport no. 161, p. 3.
  12. Ibid, no. 62, 96, pp. 4-5.
  13. Documents de la Session, Réponses aux adresses, vol. 30, 111, 1896, Réponse no. 52, Québec, 60, Victoria, A.D. 1896-97, Rapport no. 62, 96, p. 5.
  14. Ibid, p. 5.
  15. Documents de la Session, Réponses aux adresses, vol. 30, 111, 1896, Réponse no. 52, Québec, Rapport no. 2339, Dossier no. 3501, p. 6.
  16. Ibid., p. 7.
  17. Ibid., p. 7.
  18. Ibid., 1518 J., p. 9.
  19. Documents de la Session, Réponses aux adresses, vol. 30, 111, 1896, Réponse no. 52, Québec, no. 278, pp. 10-13.
  20. Ibid., p. 14.
  21. Ibid., p. 14.
  22. LEMOIGNAN, Michel, « Les Députés de la Gaspésie (1792-1963) », Revue d’Histoire de la Gaspésie, vol. 1, no. 3, Juillet-septembre 1963, p. 142.
  23. Compte rendu officiel des Débats de la Chambre de Communes du Canada, 2esession, 12e Parlement, 3-4 George V, 1912-1913, vol. CV11, Bibliothèque du Parlement, 1914, Ottawa, vol. 1, 1912-1913, col. 1821-22.
  24. Compte rendu officiel des Débats de la Chambre de Communes du CanadaOttawa, vol. 1, 1912-1913, col. 1827.
  25. Ibid., col. 1827.
  26. Compte rendu officiel des Débats de la Chambre de Communes du CanadaOttawa, vol. 1, 1912-1913, col. 1827.
  27. Ibid., col. 1828.
  28. Compte rendu officiel des Débats de la Chambre de Communes du CanadaOttawa, vol. 1, 1912-1913, col. 1828.
  29. Ibid., col. 1828.
  30. Ibid., col. 1829.
  31. Compte rendu officiel des Débats de la Chambre de Communes du CanadaOttawa, vol. 1, 1912-1913, col. 1829.
  32. Ibid., col. 1829.
  33. Compte rendu officiel des Débats de la Chambre de Communes du CanadaOttawa, vol. 1, 1912-1913, col. 1830.
  34. Ibid., col. 1833.
  35. Ibid., col. 1832.
  36. Compte rendu officiel des Débats de la Chambre de Communes du Canada, 3esession, 12e Parlement, 4-5 George V, 1914, vol. CXV, Bibliothèque du Parlement, Ottawa, vol. 111, 1914, p. 3084.
  37. Ibid., p. 3085.
  38. Compte rendu officiel des Débats de la Chambre de Communes du Canada, 4esession, 14Législature, 15-16 George V, 1925, vol. CLX1X, Bibliothèque du Parlement, Ottawa, vol. 5, 1925, p. 4275.
  39. Ibid., p. 4276.
  40. Compte rendu officiel des Débats de la Chambre de Communes du CanadaOttawa, vol. 5, 1925, Ottawa, p. 4276.
  41. Ibid., p. 4276.
  42. Compte rendu officiel des Débats de la Chambre de Communes du CanadaOttawa, vol. 5, 1925, Ottawa, p. 4277.
  43. Ibid., p. 4277.
  44. Ibid., pp. 4276-4277.
  45. Compte rendu officiel des Débats de la Chambre de Communes du CanadaOttawa, vol. 5, 1925, p. 4277.
  46. Compte rendu officiel des Débats de la Chambre de Communes du Canada, 2esession, 16Législature, 18-19 George V, 1928, vol. CLXX1X, Bibliothèque du Parlement, Ottawa, vol. 111, 1928, p. 3817.
  47. RUMILLY, Robert, « La Gaspésie », Le Soleil, Québec, 1944, 181 p., p. 26.
  48. LEMOIGNAN, Michel, « Les Députés de la Gaspésie (1792-1963) », Revue d’Histoire de la Gaspésie, vol. 1, no. 3, Juillet-septembre 1963, p. 140.
  49. Compte rendu officiel des Débats de la Chambre de Communes du CanadaOttawa, vol. 1, 1912-1913, col. 1833.
  50. Compte rendu officiel des Débats de la Chambre de Communes du CanadaOttawa, vol. 1, 1912-1913, col. 1833, 1834.
  51. Ibid., col. 1834.
  52. Compte rendu officiel des Débats de la Chambre de Communes du CanadaOttawa, vol. 1, 1912-1913, col. 1835.
  53. Compte rendu officiel des Débats de la Chambre de Communes du CanadaOttawa, vol. 1, 1912-1913, col. 1835.
  54. Ibid., col. 1835, 1836.
  55. Compte rendu officiel des Débats de la Chambre de Communes du CanadaOttawa, vol. 1, 1912-1913, col. 1837.
  56. Ibid., col. 1837.
  57. Débats de la Chambre des Communes, Ottawa, vol. 1V, 1914, p. 3335.
  58. Ibid., p. 3336.
  59. Ibid., p. 3336.
  60. Compte rendu officiel des Débats de la Chambre de Communes du Canada, 1esession, 13Législature, 8-9 George V, 1918, vol. CXXX111, Bibliothèque du Parlement, Ottawa, vol. 11, 1918, p. 2291.
  61. Ibid., p. 2291.
  62. Compte rendu officiel des Débats de la Chambre de Communes du CanadaOttawa, vol. 11, 1918, p. 2292.
  63. RUMILLY, Robert, « La Gaspésie », Le Soleil, Québec, 1944, 181 p., p. 14.
  64. BERNARD, Antoine, La Gaspésie au Soleil, Ed. Les Clercs de Saint-Viateur, Montréal, 1925, 332 p. p. 253.
  65. Ibid., pp. 253-254.
  66. Ibid. p. 254.
  67. Mandements et Circulaires, vol. 63, Circulaire au Clergé, Évêché de Gaspé, 21 juillet 1923, Référence au catalogue sur fiches pour les archives de l’Évêché de Gaspé, par l’abbé Jules Bélanger, Fiche M.C. vol. 1, p. 63.
  68. RUMILLY, Robert, « La Gaspésie », Le Soleil, Québec, 1944, 181 p., p. 17.
  69. Ibid., p. 18.
  70. Ibid., p. 19.
  71. RUMILLY, Robert, « La Gaspésie », Le Soleil, Québec, 1944, 181 p., p. 21.
  72. Mgr Ross, Rubrique : « Pour la Gaspésie », Le Devoir, Montréal, 3 nov. 1923, vol. X1V, no. 258, p. 2.
  73. Ibid., p. 2.
  74. Ibid., p. 2.
  75. Ibid., p. 2.
  76. Ibid., p. 2.
  77. RUMILLY, Robert, « La Gaspésie », Le Soleil, Québec, 1944, 181 p., p. 22.
  78. Ibid., pp. 22-23.
  79. Ibid., p. 23.
  80. Compte rendu officiel des Débats de la Chambre de Communes du CanadaOttawa, vol. 5, 1925, p. 4276.
  81. RUMILLY, Robert, « La Gaspésie », Le Soleil, Québec, 1944, 181 p., p. 24.
  82. Mandements et Circulaires, Circulaire au Clergé, no. 33, 18 décembre 1926, p. 363.
  83. RUMILLY, Robert, « La Gaspésie », Le Soleil, Québec, 1944, 181 p., p. 25.
  84. Ibid., p. 25.
  85. Ibid., p. 25.
  86. Ibid., p. 26.
  87. Ibid., p. 26
  88. Ibid., p. 26.
  89. Mgr Ross, Rubrique : « Pour la Gaspésie », Le Devoir, Montréal, 3 nov. 1923, p. 2
  90. Ibid., p. 2.