Les Roy de Val-d’Espoir, c’est d’abord mon grand-père Joseph (1889-1969), marié à Léa Bilodeau (1890-1973), deux Beaucerons. Ils arrivent à Val-d’Espoir au début des années 1930. Inutile de rappeler que les Beauceronnes et Beaucerons sont renommés pour leur sens aiguisé des affaires. Les « jarrets noirs » sont familiers avec l’entrepreneuriat. Autonome, grand-père est cultivateur-éleveur, il vend sa production, des chevaux, etc.

Christian Roy
Arpenteur-géomètre retraité, fils de Noël Roy, et résident de Pointe-Saint-Pierre

Pour commencer à raconter l’histoire entrepreneuriale des Roy de Val-d’Espoir, voici donc une énumération de quelques descendants de « Jos » qui se sont lancés en affaires, à savoir :

Alcide Roy (1912-2012) : « Personnage historique » nommé par la ville de Percé. Il est cultivateur, barbier, propriétaire d’une petite épicerie au rang 6, d’une quincaillerie au rang 5, commerce qui lui avait été vendu par mon père. Il vend aussi ses animaux de ferme en quartier en passant de maison en maison, en plus de faire le commerce de vente de peaux d’animaux. Sa dernière activité commerciale est l’achat et la vente d’antiquités. Mon oncle a déjà fait l’objet d’un article dans le Magazine Gaspésie (lien à la fin de la page). Son fils Clément a un dépanneur-station-service à Grande-Rivière. Un autre de ses fils, Lucip, a un bar à Val-d’Espoir et un autre à Grande-Rivière.

Henri Roy (1910-1977) : À partir de 1936, il exploite un magasin général à Val-d’Espoir pendant de nombreuses années. Sa fille Doris reprend les rênes de cette entreprise en 1970. Elle est aussi copropriétaire avec son fils Jason du camping Nature et Océan de Percé et Cap-d’Espoir. Une autre fille d’Henri, Claire (1934-) a un magasin de lingerie. Son fils Laurent (1935-2005) pratique d’abord plusieurs métiers à Val-d’Espoir, soit restaurateur, garagiste, etc. Puis, il joint mon père à titre de commis à sa succursale de Grande-Rivière, et ce jusqu’à la fin de Roy & Frères ltée en 1968. En 1969, il décide de se lancer en affaires à Gaspé. À cet effet, il achète du syndic de la faillite l’ancien magasin de William Hyman & Sons à Gaspé Harbour (côté sud du pont de Gaspé) pour la somme de 6 000 $. Il y exploite une quincaillerie sous la bannière Andy Handy, une chaîne ontarienne. En 1974, il achète de la famille Leboutillier le bâtiment ayant abrité le bureau de poste de Gaspe Harbour pour la somme de 15 000 $. En 1980, il est exproprié par le ministère des Transports du Québec pour le réaménagement des accès au nouveau pont de Gaspé. On lui verse une généreuse indemnité pour les bâtiments et l’achalandage de son commerce. Après un arrêt de quelques années, l’envie de redémarrer un commerce le reprend. En 1976, il achète un vaste terrain à la sortie ouest de Gaspé, soit voisin du cimetière catholique. Après sa courte retraite, il entreprend en 1981 la construction d’un vaste bâtiment sur ledit terrain. Toutefois, à la même époque, la compagnie Légaré ltée qui a un magasin au centre-ville, voisin de Cassidy Photo, passe au feu. Laurent y voit alors une autre occasion d’affaires : il propose à la compagnie Légaré, connue alors sous le nom de G.U.S. Canada, de lui vendre son nouveau magasin qu’il vient d’ériger pour une somme de 211 100 $ et il achète en même temps le terrain de GUS au centre-ville pour la somme de 6 100 $. Sur ce dernier terrain, il bâtit le magasin Rona qu’il exploite jusqu’à sa mort prématurée avec sa femme Marguerite Pomerleau. Aujourd’hui, sa femme et sa fille Jenny gèrent encore ce commerce.

Noël Roy (1924-2018) : mon père, il est né le 25 septembre 1924. Après la Deuxième Guerre mondiale, il s’établit à Val-d’Espoir en ouvrant une petite entreprise spécialisée dans la fabrication de portes et fenêtres. Il vend ce lot en 1953. En août 1954, il acquiert un petit restaurant, un genre de « snack bar ». Les affaires prospèrent, mais mon père, marié à Gabrielle Beaudry (1931-2016), fille de Théophile Beaudry (homme d’affaires de Val-d’Espoir que l’on peut qualifier de prospère : propriétaire d’un magasin général, d’un moulin à scie et « jobber » dans le bois) décide de quitter Val-d’Espoir à 27 ans. Il vend donc son casse-croûte et ouvre à la fin de 1954 une quincaillerie rue Lesseps (renommée depuis Chrétien) à Gaspé avec son frère Émilien : Roy & Frère ltée. Mon oncle Émilien ne tarde pas à céder ses parts à mon père dans l’entreprise; c’est en 1958. Cette quincaillerie évolue pour devenir un magasin presque général où on vend en plus de la quincaillerie et des services d’électricité (1955), de plomberie et de chauffage, des meubles et des vêtements. Mon père finit par posséder deux succursales en plus de celui de celle de Gaspé, soit à Grande-Rivière et à Paspébiac. Un incendie, le 31 décembre 1963, détruit la quincaillerie.

Mon père décide alors de reconstruire rue de la Reine où le commerce est alors centralisé. En 1964, après l’incendie, il relocalise donc temporairement son commerce dans un petit édifice qui correspond à l’emplacement actuel du restaurant Maestro. Enfin, il réussit à acheter une belle pièce de terrain au coin des rues de la Reine et Morin en 1965, là où se trouvait le salon de barbier Joseph. Mon père y construit une magnifique bâtisse de deux étages. Face à des difficultés financières après quelques années, il doit déposer son bilan. Ensuite, grâce à du soutien, il peut acquérir un terrain à la sortie ouest de la ville, où il entreprend la construction d’un édifice commercial de deux étages auquel notre maison est annexée. À 60 ans, l’heure de la retraite a-t-elle sonné? C’est mal connaître le personnage. Il s’est effectivement associé avec moi pour acheter un grand terrain au centre-ville de Gaspé afin d’y faire un développement domiciliaire de concert avec mon oncle Denis. Parmi ses enfants, Denise et moi, Christian, avons eu notre bureau d’arpenteurs-géomètres à Gaspé et mon frère, Gilles, possède son bureau de consultant en génie électrique, soit Hydro ECI inc.

Denis Roy : Au début des années 1970, il quitte Val-d’Espoir pour ouvrir un garage automobile avec son frère Émilien à Gaspé où on vendra des Toyota. Cette entreprise se nomme Gaspé Auto Parts inc. (la loi 101 n’est pas encore en vigueur!). Dans un premier temps, c’est Lucien, son frère aîné, qui achète la propriété d’Alvine Dupuis (Mme Armand Joncas) en octobre 1970. En 1971, Lucien revend avec profit la propriété à ses deux frères, Denis et Émilien. Ces derniers le cèdent à Gaspé Auto Parts. On notera qu’Émilien a vendu ses parts à Denis autour de l’année 1976. La compagnie Garage Denis Roy et Fils inc. est fondée le 30 octobre 1978; elle prend la suite de Gaspé Auto Parts inc. Ce garage est situé où est présentement la pharmacie Jean Coutu rue Jacques-Cartier. Les automobiles japonaises n’ayant plus la faveur populaire (prix élevé!), il décide alors de vendre des automobiles de la marque Ford. En 1987, le garage est cédé à la compagnie qui gère les pharmacies Jean Coutu; cette dernière démolit le bâtiment et le remplace par la pharmacie actuelle. Cette même année 1987, Garage Denis Roy et Fils inc. acquiert Automobiles Venus ltée, le garage situé au numéro 221 de la montée Sandy-Beach, afin de continuer la vente d’automobiles Ford. La compagnie continue ses opérations à cet endroit jusqu’en 1992. Là, on construit un nouveau garage au numéro 165 du boulevard de Gaspé sur un terrain acheté d’Allen Adams en 1981. La concession Ford y est exploitée par Alain Roy jusqu’en 2006, date à laquelle l’immeuble est vendu à une compagnie détenue par Brent Simpson; ce dernier y gère depuis ce temps une concession Mazda.

Son autre fils, Jocelyn, achète en 1992 (la même année que le nouveau garage Ford est construit) le garage Gaspé Nissan inc. appartenant aux Immeubles Chicoine inc. Ces derniers, après avoir vendu des autos de marque Datsun (en 1981, le PDG de l’entreprise décide d’abandonner le nom Datsun pour privilégier la marque Nissan), exploitent donc  la bannière Nissan. Depuis 1992, Jocelyn est le propriétaire unique de Roy Nissan inc. Toutefois, il est aujourd’hui assisté aux ventes par son frère Alain. On doit remarquer que Patrick Smith a été vendeur pour les « Roy de l’automobile » depuis l’ouverture du premier garage dans les années 1970. Tout un exploit!

Émilien Roy (1930-2006) : Mon oncle « Ti-Mile » est l’associé de mon père dans Roy & Frère ltée de 1953 à 1958. Il est aussi actionnaire du premier garage Toyota à Gaspé avec mon oncle Denis, soit dans la compagnie Gaspé Auto Parts inc. Enfin, il a un dépanneur à Grande-Rivière de 1977 à 1996.

Lucien Roy (1915-1999) : Mon oncle Lucien est arrivé à Gaspé la même année que mon père et mon oncle Émilien. En effet, en 1953, il acquiert un terrain voisin de celui de mon père rue Lesseps (Chrétien aujourd’hui). Il a une petite épicerie de quartier au premier étage de sa maison. Dans un second temps, l’épicerie est déménagée dans le bâtiment où se trouve actuellement le Subway. Mon oncle achète en 1967 cette bâtisse de Roger Gaulin. Il y dirige son épicerie jusqu’en 1971. Par la suite, Brent Simpson, sous le nom de Marché Gaspé inc., continuera pour un certain temps ce commerce. Mon oncle Lucien était connu partout sur le côté nord jusqu’à Cloridorme (sa femme est une « Coulombe » de ce patelin). Lucien est aussi actif dans le domaine immobilier. De plus, il vend des automobiles usagées. Ses garçons se lancent tous en affaires à Gaspé : Ghislain a une tabagie longtemps rue de la Reine, jusqu’à ce que le bureau de poste change d’endroit. De plus, c’est un promoteur immobilier avisé; il possède plusieurs immeubles à Gaspé. Un autre des fils de Lucien, Réal, a un commerce d’articles de sports, soit Gaspé Sportif, dans un bâtiment voisin de la tabagie de son frère. Cette bâtisse brûle et il y a malheureusement quelques décès lors de cet incendie. Cela met fin à l’aventure commerciale de Réal. Enfin, Richard a eu un dépanneur à York, non loin de l’hôpital. On y retrouve aujourd’hui le bureau de poste de Gaspé Harbour et un poste de taxi.

Quelques traits communs de tous ces Roy :

-Ils n’ont pas ou peu d’instruction. Ce n’était pas valorisé par grand-père.

-Ils ont souvent marié des femmes instruites. Par exemple, ma mère, Gabrielle Beaudry, est diplômée à 16 ans de l’École Normale des Ursulines. Mon oncle Denis est aussi marié à une diplômée des Ursulines : la « célèbre » tante Céline des annonces de Roy Nissan, propriété de son fils Jocelyn.

-Ce sont des gens résilients.

Pour en savoir plus :

Noël Roy : L’article complet sur son parcours est disponible dans le numéro La bosse des affaires (no 212).

Alcide Roy :  Lisez le texte paru dans le no 182 en cliquant ici

 

Photos (dans l’ordre)

Armoirie des familles Roy.
Association des familles Roy d’Amérique

Bâtiment du magasin Roy & Frère ltée, rue de la reine à Gaspé, fin des années 1960.
Musée de la Gaspésie. Collection Fabien Sinnett. P232/64